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Chronique 28
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Un texte de M. Barthélémy
 

Il y a « de » l’École quand une double rupture s’opère : elle regroupe en un même lieu des enfants de provenances diverses, les séparant, au moins transitoirement, de leur milieu d’origine ; elle les contraint, dans un temps donné, à entrer dans des apprentissages qui ne pourraient pas s’effectuer en dehors d’elle.

Faire entrer son enfant « à l’école », c’est souscrire à ce contrat social minimum, accepter de se démunir de certaines de ses préro­gatives de parents pour les confier à d’autres, permettre que de la séparation s’initie pour que s’instaurent des savoirs.

C’est un saut, normalement difficile pour tout parent, socialement contraint, mais qui, pour se passer le moins mal possible, nécessite une confiance qui, elle, ne peut être forcée.

A fortiori lorsqu’il s’agit de scolariser son enfant quand il est handicapé, et que cette situation de fragilité encore plus grande, encore moins facilement acceptable, rend cette confiance encore moins immédiate.

Pour autant, le contrat de base reste le même : il s’agit aussi, pour cet enfant singulier comme pour les autres, d’entrer dans un groupe de pairs, lieu, temps et modalité des apprentissages - selon le principe, dégagé par Célestin Freinet, « c’est à plusieurs qu’on apprend tout seul ».

À l’école, le groupe est supposé médiateur des apprentissages : des savoirs, certes, mais aussi, mais surtout, des savoir-être et des savoir-faire. C’est sa raison d’être, la manière que les Hommes ont inventé pour achever une maturation physiologique bien fragile, transmettre des valeurs qui fondent le vivre ensemble, permettre une nouvelle séparation, celle d’avec le groupe, pour que de l’individualité surgisse et instaure l’enfant comme sujet.

Il me semble que ce contrat de base fixe l’horizon d’attente et les limites de la scolarisation de l’enfant handicapé. Pour aller à l’école, il faut que du groupe soit possible pour cet enfant-là, que le groupe soit une des modalités possibles de la réponse à ses besoins particuliers, sans souffrance trop importante, sans adaptation inatteignable.

Lorsqu’un enfant, par exemple avec un forme d’autisme particu­lièrement sévère (et elles le sont, majoritairement), est scolarisé dans une classe ordinaire, avec comme exclusif support de la relation et des apprentissages l’auxiliaire de vie scolaire, sans que soit possible aucune interaction avec les autres, j’ai le sentiment que la logique de la scolarisation est à son terme, et que d’autres modalités de l’apprendre sont à rechercher – au moins pour un temps.

Discours de moins en moins entendable, tant sont fortes et diverses les pressions à l’œuvre : pression de l’institution Éducation nationale qui lit dans la loi de 2005 une obligation absolue là où il n’y a que préconisation ; pression des associations qui souhaitent imposer l’éducatif et le rééducatif comme unique modalité de prise en charge ; pression sociale, tant le souci de normalisation est prégnant et renvoie aux parents une image de la normalité lisse et homogène.

Discours pourtant nécessaire, qui renvoie chacun à sa place, et laisse à l’enfant toute la sienne : celle de sujet que l’on a à aider à grandir...

M. Barthélémy
31 mars 2009

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Pour écrire à M. Barthélémy : “monsieurbarthelemy–AROBASE–gmail.com” (...en remplaçant bien sûr “–AROBASE–” par “@”)

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