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Il m’est arrivé d’être invité, il y a quelques années (10 ans quand même après la loi de 2005, et 13 ans après la loi de 2002, lois fondamentales dans les évolutions de la prise en compte des personnes en situation de handicap dans la société), à une journée associative d’une grosse association départementale gérant plus d’une dizaine d’établissements et de services pour personnes handicapées, enfants et adultes. L’une des thématiques de cette journée associative était la participation des usagers, dont certaines modalités étaient présentes dans la loi de 2002 et les principes affirmés dans la loi de 2005.

Une illustration du principe de participation fut apportée par l’équipe d’un des établissements, avec une fonction d’exemplarité certainement, au sujet de la participation des usagers (en l’occurrence celle des parents d’usagers, puisqu’il s’agissait d’un établissement pour enfants) à l’élaboration du projet personnalisé d’accompagnement (PPA ou PIA). L’équipe présente à la tribune, accompagnée d’une mère d’usager, présenta la procédure retenue dans l’établissement.

Il ne fut pas question d’une rencontre de l’équipe ou de professionnels de l’équipe avec l’usager ou ses parents pour échanger sur le projet à élaborer. Soit cette rencontre (celle avec l’adolescent et celle avec ses parents) était-elle absente, soit était-elle informelle et passait-elle par des échanges informels non décrits. Toujours est-il qu’elle n’était pas explicitement instituée comme un élément fondateur de l’opérationnalité de l’élaboration du PPA.

Le (second) temps était constitué de la réunion de l’équipe professionnelle, sans l’usager ou ses parents, où chacun pouvait présenter l’évaluation qu’il faisait de la situation du jeune, et des objectifs qui lui semblaient prioritaires pour la prochaine année. L’équipe se mettait d’accord sur un certain nombre d’objectifs et de moyens, à charge pour le chef de service d’effectuer la rédaction du PPA, en indiquant explicitement les objectifs et les moyens.

Le (troisième) temps consistait en un certain nombre de navettes entre le chef de service, l’équipe et d’autre part avec la psychologue et le médecin, ces derniers étant à même de corriger de manière impérative et décisionnaire, sans concertation, le projet initialement rédigé par le chef de service, jusqu’au moment où le projet était « finalisé ». (Il n’était pas dit comment se résolvaient des conflits éventuels).

Venait enfin la présentation (nommée participation) du projet à la famille, où en définitive il ne s’agissait que de l’approbation (ou non) du projet élaboré par l’équipe. Ce dont d’ailleurs témoignèrent les propos de la famille présente à la tribune : « Je suis très satisfaite de la manière dont le projet de vie de mon fils m’a été présenté. »

Peut-on appeler cette procédure participation ? Je ne le pense pas. Cette procédure atteste plutôt d’une réelle préoccupation de mettre en œuvre les principes et les modalités des lois, mais atteste également d’une difficulté à s’extraire des habitudes professionnelles, organisationnelles et idéologiques du fonctionnement traditionnel des établissements. Le rôle du médecin à cet égard est exemplaire : ressurgit la toute puissance de la place et de la représentation médicale du handicap à travers la primauté et l’approche par la déficience. L’affichage de la participation relève du faux-semblant.

 
Un texte de Jean-Yves Le Capitaine
4 janvier 2019

 
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