Poursuivre ou non une scolarité en CLIS ?

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lulue
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Poursuivre ou non une scolarité en CLIS ?

Message par lulue »

Bonsoir,
Voilà deux ans qu'un élève trisomique est en Clis et en faisant le bilan : pas d'acquis sauf de l'éducatif, l'élève fait comme les autres mais ne semble pas comprendre ce que l'on fait ? il se limite à compter jusqu'à 3 (dénombrer jusqu'à 2), n'entre pas dans la lecture, plafonne en discrimination visuelle et en tri, parle peu (par mots simples). Je me dis que depuis deux ans, on n'a pas avancé sauf sur le "mimétisme" il me semble. Les autres enfants de la classe ne perçoivent pas cet enfant comme un élève mais comme un enfant plus jeune ( alors que ce n'est pas le plus jeune de la classe). Le service de soin dit qu'il vous attendre mais je pense de plus en plus qu'un IME serait plus adapté. Je doute, c'est difficile, je viens juste d'avoir le capa-sh, ce n'est que ma deuxième année en clis. Que me conseillez-vous ? une ESS est prévue en janvier à ma demande, j'ai dit aux parents que je trouvais que les progrès attendus ne venaient pas, est-ce-que j'en demande trop ? Merci de me donner un avis.
Bonne fête du 31
Pascal Ourghanlian
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Re: Poursuivre ou non une scolarité en CLIS?

Message par Pascal Ourghanlian »

Pour les préconisations pédagogiques liées à la trisomie 21, voir ici - c'est remarquablement fait : http://www.integrascol.fr/fichepedago.php?id=13

"Un élève trisomique" ne renseigne en rien ni sur l'enfant, ni sur l'élève. Le spectre de la trisomie est large, les fonctions atteintes variées, les possibilités de 1 à 10.

"Pas d'acquis, sauf de l'éducatif". Peut-être un peu rapide, non ? Et sur ses progrès à lui, et sur votre travail à vous.
De l'éducatif, c'est déjà pas mal : la CLIS est un choix de scolarisation collective, quand la scolarisation individuelle n'est pas possible, mais que des gains sont attendus du groupe - sans doute ce que vous décrivez par "éducatif".
La CLIS est aussi un lieu d'apprentissages scolaires. Vous en listez quelques uns : tri, petites quantités, discrimination visuelle. Vous dites qu'il "plafonne" : c'est aussi un moyen d'assurer les acquis.

À creuser avec le service de soins : quelles sont les limitations en production orale (points d'articulation / respiration / empâtement de la bouche par la langue / déglutition) ? quels sont les retentissements des atteintes visuelles (méconnues, mais souvent premières quand la cornée est en cause) ? quelles sont les possibilités motrices (globale et fine) ?

Cela vous permettra de trouver l'entrée préférentielle : visuelle, auditive (sans doute), kinesthésique - voire un croisement de 2 ou 3.

La pédagogie à mettre en œuvre est souvent (pas toujours) une pédagogie de la répétition, pas du détour, ni du retour réflexif. Mais ça marche. À la mesure de la lourdeur du handicap.

L'orientation vers un IME est possible, parfois souhaitable - pour aller vers l'IMpro puis l'ESAT. Mais pas toujours.

Pas de réponse univoque : avant d'avoir une trisomie 21, ce gamin est un gamin. Comme tout gamin, son développement est différent de celui de son voisin. Indépendamment de la trisomie. Qui ne vient qu'accentuer ces différences.

En littérature de jeunesse, pour l'aider à "accepter", les autres à comprendre : Fred et la fille différente / F. Joly ; C. Franek. - Hachette. - (Les p’tits soucis) ; Un petit frère pas comme les autres / M.-H. Delval ; S. Varley. - Bayard ; Une petite soeur particulière / C. Helft ; M. Brunelet - Actes Sud junior, Histoires de la vie - 2000

Bon courage !
Cordialement,
Pascal Ourghanlian
lulue
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Re: Poursuivre ou non une scolarité en CLIS?

Message par lulue »

Merci, je suis d'accord avec tout ça mais j'ai l'impression de ne pas être à la hauteur, je revois mes objectifs à la baisse mais je me demande toujours si c'est la clis qui est le plus profitable pour lui ,même si je suis consciente du "bain positif sur les apprentissages" que cela représente. L'IME m'inquiète,j'ai peur qu'on lui en demande moins et qu'il en fasse moins et se laisse aller. Mais je sens depuis le début de l'année un glissement comme si on était arrivés à un plafond qu'on ne peut pas dépasser même en essayant différents chemins et parfois une régression: des moments "d'absences" apparaissent de plus en plus ( au service de soins aussi). Je vais revoir tout ça avec sa psy, son orthophoniste, kiné et psychomot.. Trisomie ou pas, évidemment que c'est un enfant avant tout mais là, je ne sais plus comment faire. J'ai lu les préconisations pédagogiques liées à la trisomie 21, cela n'ouvre encore des portes, à étudier encore...
Merci encore.
Difficile d'expliquer tout ça par écrit mais cela me permet de faire un point mais simple.
jacquelinemouveroux
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Re: Poursuivre ou non une scolarité en CLIS?

Message par jacquelinemouveroux »

Bonjour,

Je n'ai pas assez d'information sur cet enfant trisomique pour donner mon avis sur sa place en Clis ou en IME.
Ce dont je suis sûre c'est qu'il est possible de faire entrer cet élève dans le monde de l'écrit et d'abord améliorer son langage en utilisant la méthode Mimetson;
cf: http://www.mimetson.fr

Tous les trisomiques que ce soit en Clis, en IME ou même des adultes ont progressé avec cette méthode.
Si l'élève ne perturbe pas le fonctionnement de la classe, j'aurais envie de dire qu'il peut bénéficier de sa scolarité à l'école élémentaire.
Ce passage à l'école est surtout important pour les parents qui doivent faire leur deuil "de l'enfant à l'école" avant d'accepter l'IME.
En tant qu'enseignante je me suis souvent dit : "et si c'était mon enfant". On a parfois l'impression qu'ils ne font pas d'acquisition mais souvent on se trompe.
La socialisation, les habitudes de vie même par mimétisme sont importantes et sont déjà des apprentissages pour ces enfants que la déficience privera de la compréhension telle qu'on la conçoit.
L'objectif à viser est l'épanouissement de cet enfant. Est-il heureux de venir à l'école?
Si la réponse est oui, il a sa place en Clis et les apprentissages se feront avec des outils adaptés et du temps. A long terme c'est une certaine autonomie dans la vie quotidienne qu'il faudra lui enseigner et qui induit des apprentissages secondaires pour nous mais essentiels pour lui.
Bon courage
Jacqueline
Pascal Ourghanlian
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Re: Poursuivre ou non une scolarité en CLIS?

Message par Pascal Ourghanlian »

Ce dont je suis sûre c'est qu'il est possible de faire entrer cet élève dans le monde de l'écrit et d'abord améliorer son langage en utilisant la méthode Mimetson. Tous les trisomiques que ce soit en Clis, en IME ou même des adultes ont progressé avec cette méthode.
Bon, enfin, moi, je connais des adultes avec trisomie 21 qui n'ont jamais pu apprendre à déchiffrer, ni à lire.

Donc, disons, que quelques uns apprennent à lire, d'autres (plus nombreux) à déchiffrer, et certains autres n'apprennent ni l'un ni l'autre.
Ce n'est pas être rabat-joie, ou ne pas croire dans les possibilités de chacun - simplement rappeler que la trisomie, lorsqu'elle est liée à la très grande déficience cognitive (et ça existe), peut rendre impossible ce type d'apprentissages.

Ensuite, pour ce qui est de la socialisation, de l'épanouissement, etc. - tout à fait d'accord.

Mais ne conduisons pas "lulue", par des propos trop entiers, à faire de cette relation-là un "combat" : ne pas baisser les bras, certes, mais ne pas croire que tout est toujours possible. Ni, surtout, le penser...
Cordialement,
Pascal Ourghanlian
Daniel Calin
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Re: Poursuivre ou non une scolarité en CLIS ?

Message par Daniel Calin »

Un petit rappel, pour enfoncer le clou. Actuellement, moins de 20% des enfants trisomiques parviennent à entrer un tant soit peu dans l'écrit, avec un minimum d'accès au sens. Il faut pour cela une conjonction de facteurs très favorables, qui échappent pour une bonne part à la bonne volonté de l'enseignant.

La mise en avant très médiatisée des très rares trisomiques qui sont parvenus à un niveau d'études secondaire entretient chez les professionnels et plus encore chez les parents de très dangereuses illusions. Une illustration. En fin de carrière, j'ai re-croisé en UPI quelques jeunes trisomiques d'une quinzaine d'années, que j'avais connus lors de leur entrée à l'école élémentaire, dans une classe spécialisée d'une qualité alors exceptionnelle. Le résultat était pour le moins décevant : aucun n'avait un accès à l'écrit un tant soit peu fonctionnel, même a minima. Même leur parole restait très défaillante, l'un n'étant pratiquement pas compréhensible. Pire : l'accent mis sur le scolaire avait amené à délaisser toute autre éducation, ce qui se traduisait entre autres par une très grande défaillance de compétences sensorielles élémentaires comme apprécier la température ou le poids - au point que ces trois jeunes gens, par exemple, se brûlaient souvent. J'ai repensé à Victor de l'Aveyron. Pour eux, comme pour d'autres d'ailleurs, la volonté forcenée de normalisation scolaire me semblait avoir induit un surhandicap, même si, bien sûr, je n'étais pas en mesure de juger de tous les facteurs en jeu (je savais cependant qu'ils bénéficiaient tous d'un environnement familial théoriquement très favorable)...

Dernière chose : Mimetson n'est pas une méthode de lecture, mais une méthode d'apprentissage de ce qu'on appelle (à tort) le déchiffrage, c'est-à-dire l'oralisation d'un texte écrit, laquelle n'a pas grand chose à voir avec la lecture. Jaurès, déjà, s'insurgeait contre cette réduction de la lecture à l'ânonnement !!! Voir sur mon site les critiques radicales de La tribune de Laurent Carle.
Cordialement,
Daniel Calin
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Re: Poursuivre ou non une scolarité en CLIS ?

Message par jacquelinemouveroux »

Tout à fait d'accord avec la réserve sur les apprentissages cognitifs concernant les enfants trisomiques. Cf. message précédent.
Je connais aussi beaucoup d'adultes atteints de trisomie21 qui ne savent ni lire, ni écrire et qui ne pourront pas accéder à cette maîtrise.

Je n'ai pas parlé de lui apprendre à lire mais de le faire "entrer dans le monde de l'écrit", ce qui est tout à fait différent.
Cela va de la simple reconnaissance d'une lettre transcription d'un son articulé à la mémorisation globale d'un mot écrit ou au déchiffrage de syllabe, de mots....

Actuellement des adolescents et des adultes qui n'avaient fait aucun apprentissage de ce type jusqu'à présent (mais qui viennent de montrer qu'ils en étaient capables) découvrent la signification de l'écriture, le code alphabétique, la combinatoire avec l'outil Mimetson via l'Association Mim'édite.
Pour ceux-là, c'est une porte qui s'est ouverte vers l'autonomie, ils ont repris confiance en eux, se sont épanouis.

Pour cet enfant trisomique scolarisé en Clis, j'ignore quelles sont ses capacités. Je ne sais pas s'il apprendra à déchiffrer ou à lire, loin de moi l'idée d'entraîner le collègue à la poursuite "d' une cause perdue".
Je sais seulement qu'avec ce support on améliorera l'articulation, le langage et il y a une possibilité de le faire "entrer dans le monde de l'écrit"... en Clis ou en IME. Et au final de constater une progression dans Les Apprentissages.
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Re: Poursuivre ou non une scolarité en CLIS ?

Message par jacquelinemouveroux »

En réponse au message de Daniel Calin

Mimetson n'est pas une méthode de lecture. Tout à fait exact. Il est bon de le préciser.
C'est une méthode gestuelle et phonologique qui a pour objectif la maîtrise du code alphabétique pour apprendre à lire.
Ni l''entraînement syllabique ni le déchiffrage n'y sont prévus. Il ne faut pas confondre oraliser et lire. Tout est mis en place pour parvenir le plus rapidement possible à la lecture compréhension et non à l'ânonnement.
Si vous saviez comme je partage votre point de vue !!!!
Sinon comment lire les mot femmes, monsieur....................etc

La méthode Mimetson a ses limites.
Elle sert à "étayer" l'apprentissage de la lecture et à faire découvrir la "construction" des mots oraux puis écrits.
De même que la méthode Borel Maisonny, la méthode Mimetson est un plus pour l'apprentissage de la lecture avec certains enfants dont les élèves de Clis.
Par l'implication affective et les gestes de mime, elle facilite la mémorisation du code et l'entrée dans la lecture. (non point dans le déchiffrage)
Cordialement
Jacqueline Mouveroux

PS: Pour les personnes atteintes de trisomie 21, il est important de rappeler le faible taux de réussite dans les apprentissages cognitifs.
Comme vous, je dénonce "cette forme de maltraitance" que peut être l'acharnement dans la poursuite d'apprentissages impossibles.
lulue
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Re: Poursuivre ou non une scolarité en CLIS ?

Message par lulue »

Merci de vos réflexions qui me permettent étayer la mienne. une question reste fondamentale pour moi et en ESS nous en débattrons : qu'est-ce-qui le plus adapté à cet enfant et à ses besoins, la Clis ou l'IME ? Je pense souvent qu'il lui d'abord nécessaire d'apprendre des choses de la vie courante (comme le chaud, le froid, s'habiller,...), est-ce-que cela sera mieux fait en IME ? L'IME est-il plus adapté ou va-t-il "glisser" au contact d'enfants peut-être plus déficients ? La comparaison à Victor l'enfant sauvage me conforte dans l'idée que vouloir le garder en Clis est certainement une façon de permettre aux parents d'avoir leur enfant à l'école comme les autres mais est-ce le mieux pour lui ???? Je doute.
Daniel Calin
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Re: Poursuivre ou non une scolarité en CLIS ?

Message par Daniel Calin »

lulue a écrit :Je pense souvent qu'il lui d'abord nécessaire d'apprendre des choses de la vie courante (comme le chaud, le froid, s'habiller,...), est-ce-que cela sera mieux fait en IME ?
Sur ce point au moins, la réponse est sans équivoque : oui, et de loin, de très loin. En particulier pour une raison institutionnelle, qui est la présence en IME d'éducateurs spécialisés, qui conduisent des ateliers (ou autres activités) qui sont, pour une part, consacrés à ces activités éducatives "de base"...
Cordialement,
Daniel Calin
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