Non, je ne connaissais pas du tout ce site, ni aucun des auteurs qui y publient. Merci pour cette découverte.
Ces textes sont pétris d'intelligence, remarquablement peaufinés, superlativement critiques,
a priori tout pour me plaire...
Et pourtant, quelque chose me met mal à l'aise, presque d'emblée. J'ai du mal à penser cela, il me faudra y revenir, lire plus avant... Quelques remarques seulement pour l'instant.
=> Frédéric Escolano est, lourdement, heideggerien. Il n'est certes pas le seul parmi "nos" intellectuels, "philosophes" en particulier, mais ça, je ne peux pas, je ne comprends pas, je ne supporte pas. Heidegger a voté pour le parti nazi en 1932, il a adhéré au parti nazi en 1933, il a eu "foi en Hitler". Certes, très vite par la suite, ses rapports avec les nazis sont devenus compliqués, mais ils n'ont cependant jamais été rompus. Il suffit de regarder une seule fois un film d'époque donnant à voir Hitler pour ne pouvoir définitivement plus comprendre qu'un intellectuel digne de ce nom et doté de toute sa raison puisse ne pas avoir été révulsé par un tel personnage. Tout comme il suffit aujourd'hui de "regarder" une seule fois Sarkozy pour le saisir comme immondice humain.
=> Le même Frédéric Escolano écrit dans
Sans appel : "
Si l’on tient qu’en dépit de leur brutalité manifeste ou insidieuse, les “gouvernances” d’entreprise ne sauraient être assimilées aux abominations en vigueur dans les camps nazis, il reste à s’interroger sur les raisons ayant conduit à un tel effondrement des capacités de résistance des sujets dans les économies libérales...". C'est là très exactement le genre de fausse évidence qui me met en alerte. Les "gouvernances d'entreprise" ne sont certes pas "abominables" pour des intellectuels distingués, mais, d'une part, ce sont bien elles qui ont subventionné le parti nazi et permis son accès au pouvoir, et, d'autre part, elles sont bien "abominables" pour les hordes miséreuses qu'elles exploitent avant de les jeter après usage pour mieux exploiter de plus misérables encore. Une inhumanité "polie" n'en est pas moins inhumaine, et fait constamment le lit des inhumanités les moins "polies". De nos jours encore, il est clair à mes yeux que la meilleures propédeutique au sarkozysme (en attendant pire) a été le jospinisme...
=> Sur le fond de cette citation, s'il y a de quoi, effectivement, s'interroger à bon droit sur cet "
effondrement des capacités de résistance des sujets dans les économies libérales", une telle interrogation n'est acceptable que si l'on a d'abord établi une différence radicale de plan entre les crapules "gouvernantes" et les miséreux qui leur sont soumis. Or cette phrase, à sa façon alambiquée, fait exactement le contraire : elle exonère les "gouvernances" de l'infamie au moment même où elle charge d'indignité les foules soumises...
=> Plus généralement, je perçois l'intellectualisme extrême de ces textes comme quelque chose de distordu par rapport à la volonté critique radicale qu'ils proclament. A qui s'adressent-ils ? Et qui servent-ils ? Plus brutalement, je doute qu'ils servent autre chose que l'Ego de leurs auteurs - et, pour un intellectuel, là est la pierre de touche, servir certes son Ego, mais aussi "autre chose" que son Ego.