J’ai écouté hier, le téléphone sonne sur France Inter, et même si j’ai beaucoup apprécié les interventions de M. Calin et M .Buttard,
j’ai trouvé que pour un auditeur lambda, suite à cette émission, c’est la position du gouvernement qui était la bonne : redéployer les instituteurs spécialisés sur un poste en zone sensible, là où ils seront le plus utiles.
L’émission avait pourtant bien commencé, une maman disait tout le bien qu’elle pensait des membres du RASED, notamment d’un rééducateur qui avait permis à son enfant d’entrer dans les apprentissages. Par contre, l’intervention du directeur d’école a donné de l’eau au moulin de M. Nembrini, en expliquant que les membres des réseaux choisissent les élèves et qu’ils ne sont pas efficaces. Cela n’est pas nouveau
http://www.cahiers-pedagogiques.com/art ... ticle=1239, M. Maire exprimait déjà en 2004 le malaise de certaines équipes de travailler avec les réseaux. Il est vrai qu’il y a encore quelques années, j’ai moi-même été très acerbe envers une psychologue de réseau qui se posait en tant que spécialiste de la difficulté des élèves, considérant les enseignants de classe, le directeur de l’école comme des « ignares » de la « vraie difficulté ». Comme l’a souligné M. Buttard, il est difficile de mesurer l’efficacité des réseaux, car les élèves suivis progressent, mais il est très difficile d’attribuer le seul mérite au suivi en aide spécialisée, le maître de la classe mettant en place une pédagogie différenciée pour cet élève, les parents prenant part au projet d’aide, d’autres personnes intervenant aussi (soins extérieurs).
Le seul mérite du réseau est justement d’être cette plate-forme d’échanges entre professionnels autour de la difficulté. Cependant, je vois poindre un déplacement de cette plate-forme « extérieure » aux établissements, vers une plate-forme « interne » à l’établissement avec la mise en place des EPLE en école primaire. Déjà pour les élèves relevant de la MDPH, ce n’est plus le réseau qui sert véritablement de plate-forme, mais l’équipe éducative réunie par le directeur, il est donc dans la logique que le traitement de la grande difficulté sera elle aussi gérée à l’interne des établissements. Il est donc tout à fait clair que les maîtres E et G seront donc au plus près des difficultés en étant dans les équipes pédagogiques. Cependant, ce que M. Nembrini ne sait pas, c’est que notre travail de prévention et de médiation est une fonction à plein temps, et que s’il me remet dans une classe, certes je ferai classe, peut-être mieux qu’auparavant, ma formation spécifique et continue (ce sont les élèves en grande difficulté qui me forment en montrant comment ils apprennent) m’ayant ouvert les yeux sur certains de mes travers d’enseignant, mais je ne pourrai plus faire ce que je fais cette année, en tant que maître E de réseau. A la limite, en aides personnalisées, je pourrais prendre des élèves relevant d’aides spécialisées, mais je ne serai plus disponible pour être la personne-ressource à laquelle on s’adresse pour aider à mettre en place les aides personnalisées, les PPRE, un groupe de prévention en compréhension, en lecture (au sein de MACLE, par exemple…), qui va rencontrer des parents qui ne viennent pas facilement à l’école pour les aider à comprendre le rôle de l’école, leur rôle en tant que parents… Je serai trop accaparée par ma gestion de classe. Merci M. Calin d'avoir essayé de faire comprendre que même si nous sommes des enseignants, nous pourrons certes reprendre une classe, mais alors nous ne pourrons plus faire notre travail de membre de réseau. Je crains cependant que M. Nembrini n'ait pas entendu ce message, étant pris dans une logique comptable. Je travaille dans un secteur rural, et beaucoup de collègues apprécient le travail du réseau et se demandent comment ils vont faire pour gérer les élèves en grande difficulté si l’antenne est supprimée, certains cependant, se disent que, de toute façon, les élèves en grande difficulté sont «irrécupérables», même s’ils sont aidés par le RASED au cycle 2, ils seront toujours en grande difficulté au cycle 3 et au collège et qu’il est temps de nous remettre en classe, pour que nous soyons efficaces
J’ai été surprise d’entendre M. Nembrini dire qu’il ne remettait pas en cause les réseaux, et que si 1/3 des effectifs partaient sur des classes, les 2/3 restant pourraient continuer à faire leur travail de réseau, il n’a donc pas confirmé la disparation complète des réseaux alors qu’il venait de dire qu’ils sont inefficaces. Je crois que nous serons fixés sur notre sort lors du vote du budget et suivant la mobilisation des collègues de classe, des parents d’élèves.
Pour finir sur une note d’espoir, un collègue directeur a tenu à mettre à l’ordre du jour de son conseil d’école la disparition des RASED pour alerter les parents et les élus de ce qui se trame. Il m’a laissé présenter la différence entre aide personnalisée (soutien) et aide spécialisée, et je crois que c’est grâce à ces collègues qui reconnaissent notre travail que nous pouvons espérer.
Les parents ont compris que pour certains élèves, les aides personnalisées sont inefficaces, et que le réseau en apportant son regard pluriel est une des réponses les plus appropriées, car elle est aussi portée par des enseignants. En supprimant les réseaux, on supprime la grande difficulté scolaire, considérant qu’elle n’existe pas, car d’après M. Nembrini, elle sera réglée en amont par les aides personnalisées. En simplifiant, si l’élève est en grande difficulté, soit c’est un problème d’ordre pédagogique qui sera traitée dans le PPRE avec des aides différenciées en classe, des aides personnalisées, ou soit c’est un problème qui relève du champ médical (MDPH). Les difficultés plurielles n’existent plus dans
l’ordre pédagogique nouveau où tout est clair et limpide à l’image de la méthode de lecture prenant la lettre comme unité de départ !