Affectation en CLIS

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AVD
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Affectation en CLIS

Message par AVD »

Bonjour à tous,

Sachant que les commissions des différentes MDPH étudient les dossiers des élèves devant être orientés en ce moment, certains parents viennent visiter les CLIS indiquées par les enseignants référents (celles où leur enfant pourrait être éventuellement scolarisé). J'ai donc reçu une famille, pour l'instant, et je dois en rencontrer une autre prochainement. Je trouve la démarche plutôt saine, puisqu'elle permet à ces parents de savoir ce qu'est une CLIS et souvent, de les rassurer, donc de dédramatiser.
Il y a donc un nombre d'élèves orientés en CLIS, à répartir sur les différentes classes spécialisées de la ville concernée. J'aimerais savoir qui décide de l'affectation des élèves dans telle ou telle CLIS et surtout, selon quels critères. Car encore une fois, la législation est claire là-dessus, les personnes responsables des affectations doivent veiller à le faire en ayant toujours à l'esprit de préserver la cohérence du groupe.
Un psychologue scolaire peut-il être en droit, par exemple, d'exiger de l'inspection qu'elle limite le nombre d'élèves accueillis dans une CLIS, si celle-ci doit scolariser un nombre important d'élèves ayant des troubles de la conduite et du comportement ?
Peut-on connaître, en tant qu'équipe accueillante, le profil des élèves arrivant, afin de limiter d'éventuelles incompatibilités ? Je me permets de parler de ça, car j'y suis chaque année confrontée. Je ne suis pas contre le fait d'accueillir tel ou tel élève. Simplement, d'anticiper un peu pour éviter de me retrouver dans des situations explosives et ingérables.
Qu'il n'y ait pas de méprise : ça n'est pas connaître le profil pour dire celui-là, j'en veux et celui là, je n'en veux pas. Mais pouvoir dire attention, ces deux élèves ensemble, ça n'est certainement pas la meilleure solution. Et réfléchir à une autre solution avant que les choses soient, quasi définitivement, mises en place.
Existe-il un moyen de faire respecter cette loi ?
Merci d'avance.
clairea
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Re: affectation en clis

Message par clairea »

Bonjour,
AVD a écrit :Un psychologue scolaire peut-il être en droit, par exemple, d'exiger de l'inspection qu'elle limite le nombre d'élèves accueillis dans une CLIS, si celle-ci doit scolariser un nombre important d'élèves ayant des troubles de la conduite et du comportement ?
Pour vous répondre, le psychologue ne peut et n'a pas à exiger quoi que ce soit d'un point de vu institutionnel... un psychologue n'exige pas !

Parfois, on le consulte et il donne un avis ou offre un autre regard sur une situation institutionnelle...

Mais un psychologue n'exige rien ni des familles, ni de l'enfant, ni de l'institution ... il questionne .

Pour le reste de votre message, je pense que Pascal vous répondra mieux que moi :)
Daniel Calin
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Re: Affectation en CLIS

Message par Daniel Calin »

AVD a écrit :la législation est claire là-dessus, les personnes responsables des affectations doivent veiller à le faire en ayant toujours à l'esprit de préserver la cohérence du groupe
Je suppose que vous évoquez ce passage de la Circulaire n° 2002-113 du 30 avril 2002 :
"Cela conduit à souligner la nécessité d’attacher une attention particulière à la composition de chaque classe de manière à assurer la compatibilité des projets individualisés avec le fonctionnement collectif du groupe. La constitution du groupe doit impérativement être effectuée en ayant le souci d’un projet pédagogique cohérent, condition indispensable de progrès pour les élèves. Il ne s’agit évidemment pas de rechercher une homogénéité qui serait vide de sens, mais une compatibilité des besoins des élèves et des objectifs d’apprentissage, qui rende possible une véritable dynamique pédagogique."

Ce texte, qui n'est pas une "loi" mais une simple circulaire, est effectivement assez clair et vous donne a priori raison. Sauf que le même texte n'évoque nulle part une quelconque concertation avec l'enseignant concerné, pas même une demande d'avis, ni la possibilité de "stage" pour les élèves, ni les visites de parents d'ailleurs. Même la consultation des "projets de classe" des enseignants en charge des CLIS n'est pas explicitement prévue ! Tout se passe comme si c'était l'instance de décision d'orientation (CDES avant, CDAPH maintenant) qui était chargée seule de la mise en œuvre de ce texte, absurdité qui vide automatiquement ce texte de sa substance.

Du coup, dans la réalité, c'est là le pire point noir des CLIS, très souvent rendues "impossibles" par des mélanges détonants. Il faut des situations locales particulièrement favorables pour éviter ces dérapages. Il est probable que la récupération des failles monumentales du cadre législatif et réglementaire repose, là encore, sur les épaules de l'enseignant référent. Mais là, je laisse moi aussi la parole à Pascal...
Cordialement,
Daniel Calin
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Re: Affectation en CLIS

Message par Pascal Ourghanlian »

Merci Claire, merci Daniel :?

Chez nous, jusqu'au mois de juin dernier, les affectations en CLIS, par délégation de l'IA incombant aux IEN, se faisaient lors d'une réunion IEN + référents. Nous y évoquions, rapidement, les "profils" des gamins et, sauf aberrations géographiques trop flagrantes (mon département fait 80 km de long sur 30 de large), nous tentions de constituer des CLIS "vivables".
Il semble que, désormais (mais j'attends le mois de juin pour vérifier la réalité de ce mouvement nouveau), les affectations privilégieront la proximité géographique avec le lieu d'habitation (pour réduire les coûts en taxis, sans doute), favorisant le melting-pot et sans vérifier la "compatibilité" des gamins entre eux (enfants avec psychoses entrant en résonance, enfants avec image d'eux-mêmes dégradées mêlés à des enfants très limités cognitivement, etc.).
Encore une fois, cela n'est pas du fait de la MDPH, mais de l'IA. Ne chargeons pas toujours la barque dans le même sens...

Je parlais de CLIS "vivables", pas de CLIS "homogènes" : 12 psychoses ensemble, ça peut être "homogène" ; vivable, c'est une autre histoire. De même, une CLIS avec 12 enfants de 10 ans, c'est peut-être "homogène" ; pour gérer les temps d'intégration en classes ordinaires sur seulement 3 ou 4 classes de cycle 3, ça devient difficile.
Donc je suis assez réservé sur les CLIS "homogènes". Et je milite pour les CLIS "vivables", qui peuvent mêler enfants de 6 à 12 ans, enfants avec psychose, "troubles" du comportement et déficience intellectuelle - du moment qu'un projet de groupe cohérent pour tous et des projets individuels pour chacun puissent être montés.

Nous avions réussi à maintenir une CLIS à 8 (au lieu de 12) pour des enfants ordinairement intelligents mais avec d'importants "troubles" de la personnalité, avec l'appui de l'IEN de la circonscription et du service de soins référent : il semble que cela soit la fin de ce projet spécifique... 4 places à prendre, c'est toujours bon à prendre...
Cordialement,
Pascal Ourghanlian
AVD
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Re: Affectation en CLIS

Message par AVD »

Bonjour,

Je viens de lire vos réponses, aux uns et aux autres et j'aimerais vraiment savoir comment nous, enseignants spécialisés, pouvons faire reconnaître qu'en tant que personne travaillant avec des élèves parfois six heures par jour, avons le droit de travailler dans des conditions décentes. Je crois que les personnes qui prennent des décisions, parfois un peu trop à la légère pour tout un tas de raisons (indépendantes de leur volonté ou non), n'ont pas conscience des répercussions que celles-ci peuvent avoir sur une classe.
Certaines classes deviennent des annexes d'un ITEP, de l'hôpital de jour, des gamins se retrouvent parfois dans les mêmes structures de soins et dans la même classe alors qu'ils ne se supportent pas. Je comprends que l'on manque de temps, mais du coup, ça manque énormément de sérieux.
Travailler dans une classe où l'enseignant passe son temps à tenter de maintenir un équilibre extrêmement précaire, c'est épuisant.
Quant au psychologue scolaire, je suis bien d'accord qu'il ne peut rien exiger. Je pense quand même, et j'en suis convaincue, qu'il peut à un moment se positionner pour défendre l'intérêt et le bien-être psychique et physique d'un élève, d'un groupe d'élèves, d'un enseignant en souffrance, d'une équipe qui perd pied à cause d'un gamin... Le psychologue fait partie d'une équipe. Je ne parle pas du travail qu'il effectue avec les élèves, les familles ou l'institution. Mais d'anticiper sur des situations qui risquent de devenir catastrophiques. Et lui, justement, en tant que psychologue, peut mettre en garde. J'en ai vraiment ras le bol d'entendre parler de défaut d'orientation, d'erreur d'orientation. A quoi sert la prévention?
Il serait peut-être bon que chacun prenne ses responsabilités. Parce que qui fait les frais de tout ça au final ?
Certaines situations peuvent parfois évoluer seulement au bout de deux ans. Et pendant deux ans, on assiste complètement démuni, à l'explosion des élèves, on travaille avec un groupe qui n'en est pas un et on essaie de panser les choses comme on peut. On multiplie les réunions, on répond dans l'urgence, on envoie l'élève ici, ou là, pour soulager l'enseignant.
Je vous parle de la réalité du terrain, de ce qui peut se passer dans des classes.
Il faut parfois beaucoup de temps pour amener les parents à accepter telle orientation plutôt qu'une autre, à reconnaître le handicap de leur enfant. N'importe quel enseignant spécialisé est conscient de ça. En attendant, ceux qui sont dans une classe vivent la réalité de cette classe au quotidien. Vous avez bossé dans des CLIS ou dans des CLAD, non ?
Alors je pense que l'on peut tout de même soumettre très fortement certaines choses pour éviter de bosser dans de trop mauvaises conditions. Nous devons nous adapter aux enfants, adapter les apprentissages, être à l'écoute de tout, je pense que nous avons aussi nos propres limites. Et si elles sont dépassées, notre travail ne sera alors plus efficace. Je suis certaine que nous avons les moyens d'éviter d'en arriver à ces extrêmes.

Chaque année, je fais 80 heures supplémentaires pour tout ce qui concerne les ESS (sans parler des préparations des réunions en elle-mêmes) en travaillant le samedi matin.
Quelle reconnaissance ?
On accueille tous les élèves, on se bat pour qu'ils participent à toutes les activités de l'école, les collègues intègrent dès que c'est envisageable, on mène un véritable combat pour que chaque élève puisse s'épanouir, venir à l'école avec le sourire, évoluer, sortir de la CLIS avec un bagage qui lui servira directement. Et parallèlement, on nous retire le peu de moyens qu'on a, on est de moins en moins soutenu.
Alors que faire ?
Subir en disant, on applique les directives, même si on sait que ça se fera au détriment des élèves?
Faire venir les élèves le mercredi matin, comme c'est prévu dans notre académie, sans moufter ? Sachant que les équipes de soin en tout genre ne travaillent pas le samedi matin et que les élèves vont faire une journée continue le mercredi et qu'ils n'auront donc pas de pause dans la semaine. Les gamins de CLIS ????? Et les psychologues scolaires ne peuvent rien dire, ne peuvent pas se positionner ?????
Je ne comprends plus, alors.
Il y a beaucoup de choses qui devraient faire réagir, voire bondir.
On est en train de leurrer les gens sur la prise en charge de la difficulté scolaire, de mentir au sujet de la scolarisation des gamins handicapés, de mettre en place une école à deux vitesses, de faire des CLIS des classes poubelles et personne n'ose exiger des choses sous prétexte que ça n'est pas à lui de le faire ??????????
Je crois, d'après ce que j'ai lu et entendu, que l'analyse faite actuellement des conséquences de l'application de la loi 2005 n'est pas très "glorieuse": nombreux dysfonctionnements, problèmes liés à la manière dont les parents peuvent user de leur pouvoir, réponses de l'institution... Quelles suites donner à ce bilan plus que mitigé ?

Vous l'aurez compris, il s'agit d'un coup de gueule qui n'a rien à voir avec qui que ce soit en particulier. C'est l'actualité et certaines aberrations de notre système éducatif qui me font réagir aussi vivement.

Bien cordialement.

AVD
Daniel Calin
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Re: Affectation en CLIS

Message par Daniel Calin »

Dans le genre "coup de gueule", souvent très proche du message d'AVD, voir mon entretien avec Delphine Sée, initialement publié dans la revue Éducation Enfantine, en Novembre 2006.

Le moins que l'on puisse dire que ce coup de gueule n'a guère produit d'effets... Qui se soucie de nos coups de gueule ? :twisted:
Cordialement,
Daniel Calin
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