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par sarahsegpa35 » 21 janv. 2016 13:08
Je voudrais réagir par rapport au DNB pro.
Je suis de ceux et celles qui affirment que des élèves de SEGPA peuvent réussir le DNB pro. Contrairement à ce que tu dis ,Tesla , je pense que ce n'est pas parce que mes élèves ne connaissent pas leurs tables en 3°, ou qu'ils ne savent toujours pas différencier parallèle et perpendiculaire que je dois leur interdire d'accéder à des savoirs ambitieux et exigeants.
Mon rôle de pédagogue est de construire des situations appropriées , différenciées qui parviennent à les mobiliser . Nous sommes enseignants spécialisés , nous sommes donc des « enseignants-inventeurs ».
Dans ma posture d'enseignante , il n'y a pas d'espace pour un assujettissement à de quelconques « conditions », « potentiels » ou « volontés », préalables qui leur permettraient d'accéder ou non à ces savoirs.
C'est ainsi que je comprends le principe d'éducabilité. Principe, basé sur la reconnaissance de droit , et qui me demande de construire pour le jeune, des projets ambitieux dans le but d'«instruire et d’émanciper», plutôt que «de produire un élève calibré», comme le dit Philippe Meirieu. L'accès aux biens culturels, aux savoirs complexes, à l'abstraction doit être ouvert à tous et pas seulement aux «bons» élèves à ceux «qui peuvent suivre» le cursus dit «ordinaire». C'est pourquoi je pense que pour nos élèves de SEGPA, il s'agit d'éviter de se cantonner aux seuls savoirs et apprentissages qui leur seraient utiles, qui viseraient uniquement «leur employabilité future», comme le dit Chantal Costa. Je rejoins encore Meirieu qui dit qu'« avec les jeunes en difficulté ou dits tels, il faut étudier Einstein. Et il faut peut-être l’étudier avant même la règle de trois. Non pas parce qu’on n’étudiera pas la règle de trois mais parce que ce qui les mobilise vraiment c’est ce qui comporte des enjeux intellectuels forts. »
Alors oui, mes élèves ne connaissent pas leur table de multiplication par cœur , oui ils ne savent pas poser une division mais ils apprennent à construire le théorème de Pythagore , résolvent des équations du type « ax +b =c », sont capables de calculer des écritures algébriques avec des nombres relatifs etc … Toute chose qu'ils voient pour la 1° fois avec moi , en 3°. Et ils en sont tellement fiers et heureux !! Parmi mes élèves, que j'accompagne sur les 4 années , la moitié environ a une reconnaissance MDPH, et certains viennent de CLIS. Il n'en reste pas moins qu'environ la moitié d'entre eux réussissent leur DNB pro.
Ceci étant, accès au DNB n'est pas synonyme d'inclusion possible . De fait, pour moi , c'est impossible. Parce que, en classe ordinaire, pas de pédagogie différenciée, méconnaissance fréquente des obstacles épistémologiques, difficultés de rythme, ... Parce que, si nous enseignons tous, nos "métiers" d'enseignant ordinaire ou enseignant spécialisé, ne recouvrent pas les mêmes posture , éthique, et actions.