Intégration ou inclusion ? Quelle est la différence ?

[didoune56]

Bonjour,
Je prépare le CAPA-SH et lors de recherches pour mon mémoire, je me trouve coincé entre ces deux termes : Quelle est la différence entre intégration et inclusion ? Quel terme peut-on donc employer ?
Merci

[Boogie]

Des ressources sur ce thème dans la revue Reliance, notamment ce numéro :
http://www.editions-eres.com/resultat.php?Id=1530
ou celui-ci :
http://www.editions-eres.com/resultat.php?Id=1828
que vous trouverez sans problème dans une bibliothèque universitaire, ou en commande dans une librairie ou chez les éditions Erès directement. (je fais de la pub, hein)

Mais rapidement : l'inclusion dépasse la notion d'intégration en ceci que cette dernière trouve ses limites dans le fait que, caricaturalement, la juxtaposition des corps valides et non-valides suffit à proclamer une réussite, sans souci porté aux relations entre élèves, à une réelle démarche de compréhension de l'autre, là où l'inclusion exige la construction de relations permettant justement d'y aboutir.

La notion d'intégration est critiquée dans un cadre plus large que l'intégration scolaire, et la notion d'inclusion concerne aussi d'ailleurs ce cadre global : on parle aussi d'intégration ou d'inclusion des personnes immigrées.

C'est un changement de paradigme : là où l'intégration exigeait une adaptation à sens unique, centrée sur la personne dite intégrée, l'inclusion implique que l'environnement d'accueil (l'institution scolaire en ce qui nous concerne) fasse également un effort d'adaptation pour favoriser l'accueil des personnes concernées. Dans un processus d'inclusion, l'arrivée d'une personne qui ne se situe pas dans la norme (la norme scolaire pour nous) oblige cette dernière à être questionnée, là où une démarche d'intégration impliquait surtout une nécessité pour les personnes de se conformer à cette norme, qui se trouvait ainsi renforcée.

La loi de février 2005 est dans son esprit une loi inclusive. Voir aussi le passage de la classification internationale du handicap (CIH) en 1981 à la classification internationale du fonctionnement humain (2001), passage qui comporte aussi, toute proportion gardée, celui du paradigme intégratif au paradigme inclusif. Une bonne et courte analyse de ce passage de la CIH à la CIFH est proposée dans le livre de Bonjour et Lapeyre de 2001 : "le projet personnalisé de scolarisation : clé de voûte de l'école inclusive ?"

Je n'ai pas de connaissances sur la généalogie de la notion d'inclusion mais j'ai pu constater que la littérature anglo-saxonne et anglaise en particulier était très fournie sur ce sujet.

Dans l'acronyme UNAISSE, il y a Inclusion (union nationale pour l'avenir de l'inclusion scolaire, sociale et éducative). C'est une association (dont je fais partie), fondée par des accompagnants scolaires, qui a une conception inclusive justement de l'action du personnel AVS - ce qui implique deux points centraux : que l'élève accompagné n'est pas le seul "objet" d'intervention de l'accompagnant, et que le point de mire, dans toute les situations, est la fin de toute intervention.

(je fais encore de la pub)

bon courage pour vos travaux.

[Pascal Ourghanlian]

Une bonne conf de Sylvie Solère-Quéval lors des amphis de l'ASH, audible ici : http://www.creteil.iufm.fr/ressources/a ... inclusive/

[didoune56]

Merci beaucoup pour les réponses.
Je viens d'écouter la conférence de Sylvie Solère-Queval qui est très intéressante. Elle m'a permis de clarifier certains concepts (insertion, intégration, inclusion...).
Encore merci

[Boogie]

Un extrait d'un livre de Henri-Jacques STIKER, de 2000, "Pour le débat démocratique, la question du handicap", aux éditions du CTNERHI, très en lien avec la problématique de l'inclusion, même s'il ne cite pas ce terme :

"(...) il faut s'insurger contre la notion de "milieu ordinaire" : le milieu ordinaire n'est que celui que l'on définit comme le milieu moyen, où les citoyens moyens évoluent. On le croit plus ou moins intangible et on pense qu'il appartient aux infirmes et aux handicapés de le rejoindre, mais ce n'est surtout pas cette moyenne, où les "valides" (c'est-à-dire ceux qui se trouvent dans la moyenne) se sentent bien, qui doit se modifier. On pense spontanément que le chemin est à faire, avec force subvention et force aides diverses au besoin, par celui qui est éloigné de la moyenne. Nous ne nous rendons même plus compte combien cette idée de moyenne, abstraite du reste, habite nos esprits de telle sorte que nous perdons de vue le continu qui sépare chacun d'entre nous sur une échelle infinie de degrés. Le milieu ordinaire n'a rien d'ordinaire et la notion de valide n'a aucun sens." p.45

Plut tôt il faisait mention du fait que par son existence même, le milieu spécialisé dédouane les autres secteurs de se soucier des personnes handicapées :

"la constitution d'un secteur spécialisé (...) exempte qu'on le veuille ou non les autres secteurs de se préoccuper des handicapés.". p. 21

Autant de questions qui mettent bien en relief la façon qu'ont certains chercheurs de tenter de définir la notion d'inclusion, en rupture avec celle d'"intégration".

Pour la question des limites de l'intégration, voir aussi "les exclus de l'intérieur", dans "La misère du Monde", Bourdieu 1993.