Dysphasie

Problèmes généraux (psychologues scolaires, option E, option G).
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Sylmel
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Dysphasie

Message par Sylmel »

Bonjour,

Cette année, lors de nos équipes éducatives, très souvent des hypothèses de dysphasie ou de dyspraxie ont été posées... Et moi, très souvent, je n'ai rien vu venir. BOUM ! Impression très forte d'être incompétent aux yeux de mes collègues des classes ordinaires ! :(
J'ai essayé de fouiner un peu sur différents sites et j'ai la nette impression que les conseils prodigués pour ces dys sont tous les mêmes !!!
En tous les cas, il m'a été demandé d'accompagner un enseignant pour la mise en place d'un projet d'aide pour un enfant dysphasique (le diagnostic a été posé par l'ortho et sera très certainement validé par un centre de réf).
Que proposer au sein de la classe et notamment sur le versant langagier ?
Cet enfant s'inscrit dans la communication mais n'est pas compréhensible sur le plan explicitation. Je l'ai rencontré deux fois et ai eu du mal à le comprendre... Il est actuellement dans une classe de maternelle/CP. Proposer des activités langagières avec des plus jeunes ne me semble pas pertinent, étant donné qu'il manque de confiance en lui ; j'ai peur que son image de lui-même soit touchée...
Quelqu'un peut-il m'aider à me dépatouiller ? Merci par avance
Sylmel
Pascal Ourghanlian
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Message par Pascal Ourghanlian »

Deux grandes formes de dysphasies : les formes réceptives, rares, et les formes expressives, les plus courantes.

Parmi ces dernières, quatre grands types :
- le syndrome phonologique-syntaxique (le type le plus fréquent) qui affecte essentiellement la production orale des phonèmes et leur séquence ; la compréhension, y compris syntaxique, est relativement préservée ;
- les déficits de la programmation phonologique se caractérisent par un trouble de la planification articulatoire qui conduit à un jargon articulatoire non compréhensible ; la compréhension est en général préservée ;
- le syndrome lexical-syntaxique est caractérisée par le manque du mot (impossibilité à évoquer le nom des images d'objets, voire des objets eux-mêmes, et recours à des périphrases ou à des sur-catégorisations) ;
- le syndrome sémantique-pragmatique se caractérise par des "coq à l'âne" ou des formules toutes faites qui donnent aux productions orales un côté incohérent (ce type se distingue des trois autres en ce qu'il est rarement isolé, et souvent associé à des épilepsies ou à des hydrocéphalies).

La classification est commode, mais il est difficile en pratique de poser de telles distinctions, d'autant que, le plus souvent, les prises en charge sont assez similaires.

La grande idée, c'est que le montage de la lecture-écriture est un moyen de contourner les difficultés propres à la dysphasie. Le souci, c'est que souvent les gamins avec dysphasies se trouvent avoir une dyslexie sévère, voire une dyscalculie.
Si l'on tient compte d'une hypothèse qui pose que la principale difficulté des gamins avec dysphasie est le traitement temporel de la parole (aussi bien en émission qu'en réception), le recours à une spatialisation de l'oral par l'écrit reste une piste. Si on croise cette approche avec un impératif de séquencialisation des étapes (j'en parle ailleurs à propos des enfants avec dyspraxies), on peut penser que le recours au clavier d'ordinateur (si dyspraxies associées...) ou à l'imprimerie Lego (si pas de dyspraxies associées...) est un moyen commode de lier les deux.
La lecture par la voie d'assemblage est d'emblée difficile. Il faut recourir à la voie d'adressage, autrement dit à la "globale" :lol: puis à la lecture syllabique (en couleurs). La lecture phonémique risque de rester un calvaire - ce qui pose, à terme, la question de la compréhension de textes longs avec un vocabulaire non connu. Le passage par les gestes est alors souvent déterminant (Borel-Maisonny, voire français signé, ou passage par les pictogrammes - Makaton). Le passage par des substituts de communication orale (GoTalk, B.A.BAR, etc.) est parfois nécessaire. Tous outils à mettre en commun entre l'école, la famille et le lieu de rééducation.

Attention ! L'entrée dans le nombre est souvent délicate (nom oral des nombres et transcodage).
Cordialement,
Pascal Ourghanlian
patrick
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Message par patrick »

Si l'enfant est reconnu comme porteur d'un trouble aussi important qu'une dysphasie on ne peut pas demander à un membre du rased d'accompagner l'enseignant dans la conception d'un projet.
Il faut à mon avis exiger la mise en place d'un PPS, il est urgent justement de ne pas intervenir . La souffrance de cet enfant doit être reconnu et l'orthophoniste ne peut être la seule, vous parler d'une confirmation médicale. Par contre dans le PPS vous trouverez votre place!!
clairea
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Message par clairea »

Oui, en effet, ca diagnostique beaucoup en ce moment dans les équipes éducatives, et je regrette que l'on devienne si téméraire, orthophoniste y compris, quand il s'agit de catégoriser un enfant.

Nous remarquons alors combien le savoir de l'autre, ce savoir médical nous renvoie à notre incompétence ... vous en témoignez joliment et je m'empresse de répondre à votre embarras, vous n'avez pas à savoir poser un diagnostic...

La dysphasie ou la dyspraxie sont des troubles très spécifiques, les explications données par Pascal me semble assez complète et vous y trouvez sans doute matière à réflexion. Mais cela ne répondra pas à votre question, comment enseigner à ce gamin... cette réponse là ne peut se construire que dans l'espace inter subjectif du maitre et de l'élève. Un enfant avec un trouble dyspraxique n'en vaut pas un autre, car avant la dyspraxie il y a l'enfant.

Mais j'insiste, ce qui se joue dans ces équipes éducatives est très problématique. Le diagnostic entre de plus en plus dans l'espace scolaire et dépossède les enseignants de leur savoir à enseigner.
Il est important parfois qu'un diagnostic soit poser afin de mettre en place des stratégies thérapeutiques et d'apaiser une certaine angoisse chez la famille, mais est ce si indispensable à l'acte d'enseigner ? je finis par craindre plus d'effets négatifs que positifs à cette entrée massive du savoir médical dans l'espace scolaire.

Comme Patrick, je pense qu'il faut attendre cette confirmation médicale, elle n'est pas toujours si évidente et ensuite construire un projet pour accompagner cet enfant, ( et non pas accompagner cette dysphasie) dans l'école. Là, le RASED peut, en cohérence avec les soins extérieurs, éventuellement intervenir .
Pascal Ourghanlian
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Message par Pascal Ourghanlian »

D'accord avec Patrick et Claire, bien sûr. C'est pourquoi je me suis contenté d'une réponse "technique" sur le forum, réservant un autre type de réponse à Sylvie en courriel (et en courrier) perso'.

Pour revenir au cadre institutionnel, effectivement, si un diagnostic est posé par un centre référent (adossé à un CHU, je le rappelle), il convient alors que les parents saisissent la MDPH pour que soit reconnu le handicap de leur gamin et qu'un PPS puisse être mis en oeuvre à son bénéfice. On est alors dans le cadre de la loi de 2005. Tout le reste ne serait que bidouillage, avec diagnostic médical sur la place publique, dépossession des enseignants de leurs compétences propres, report sur des "spécialistes" extérieurs de la responsabilité de la "prise en charge" (je vais finir par définitivement haïr ce terme), etc.

Par contre, si le diagnostic de dysphasie est posé, vu la lourdeur de l'accompagnement (de l'enfant ET de sa famille), il y a tout lieu de mettre en oeuvre des actions concertées et convergentes pour aider à réduire le handicap et à compenser ce qui ne peut être réduit (et, malheureusement, la dysphasie n'est pas une dys- "comme les autres", je veux dire une dys- de "riches", contre lesquelles se lève, à juste titre, un Jacques Fijalkow - c'est un handicap sévère, lourd, qui retentit sur toute une vie, et qui demande autant que l'accompagnement qu'une maladie neuromusculaire ou un déficit sensoriel ou un trouble psychique).
Cordialement,
Pascal Ourghanlian
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