Ma meilleure ennemie
Posté : 22 oct. 2009 14:56
Bonjour à tous,
Je me permets de soumettre à votre analyse la situation suivante :
J'enseigne en CLIS depuis 7 ans (capsais D), dans une petite ZEP d'une petite ville de province. Il y a cette année 12 élèves dans ma classe, entre 9 et 13 ans, 8 garçons et 4 filles. Le niveau global se situe sur le cycle 2. C'est un groupe calme en comparaison avec ce que je peux lire ici ou là sur ce forum, sans doute un recrutement encore dans l'esprit "perf" de naguère. Les élèves travaillent quand ils sont disponibles, font des progrès, sont parfois difficiles et demandent de l'énergie... Rien que de très ordinaire, si j'ose. J'attache une importance énorme dans ma pratique au respect de la parole et j'essaie autant que je peux de faire avancer le groupe dans la pensée réflexive. Nous pratiquons un quoi de neuf quotidien qui sert de base aux activités de la matinée, un conseil, et un atelier philo avec la rééducatrice (pendant qu'elle existe encore)...
Voici le problème :
Depuis l'année dernière, deux de mes élèves, filles, du même âge, arrivées en même temps dans la classe, non lectrices, sont dans une relation fusionnelle qui se joue sur un mode conflictuel très sévère.
Miroir : elle ne peuvent se passer l'une de l'autre mais ne se supportent pas, l'une "A" (gros suivi hdj+sessad, famille thérap) passe à l'acte souvent et de manière parfois très violente, l'autre "O" (demande sessad en cours) agit de manière insidieuse pour déclencher les crises de "A" avec, il faut le dire, un certain succès. Les autres élèves filles se "liguent" à l'une ou l'autre en fonction de l'actualité, ce qui ne fait qu'envenimer les situations. “O” semble se complaire dans la position de victime de “A”. “A” se dit en permanence la cible des provocations de “O”. Elle vivent toutes les deux dans des configurations familiales compliquées, avec des recompositions et de sérieux conflits entre parents biologiques et beaux parents. Elles manipulent toutes les deux les adultes de l'école à leur manière propre, ce qui ne fait qu'enkyster les soucis. Ce matin, la belle mère de “O” a menacé “A” de représailles si elle continuait à martyriser “O”. “A”, effondrée, jure qu'elle n'a rien fait et demande refuge dans la classe pour ne pas “péter les plombs”, chaque déplacement du groupe est problématique (aucun problème en classe, mais le conseil est également un espace propice à la manipulation inconsciente du groupe de l'une au détriment de l'autre). J'en passe... Je pense que vous voyez le tableau et que cette situation fait écho à beaucoup d'autres pour vous.
Que faire ? Que fais-je ? J'essaie de tenir le cadre dans la plus grande neutralité mais je constate que je me sens parfois obligé de protéger “O” de “A” et inversement, cela va de soi. Je me sens objet de manipulation, inconsciente, certes, mais objet impuissant, ce que je n'opposerais pas pour autant à “non tout-puissant”. J'essaie de concilier dans la classe les travaux de groupes, individuels et en grands groupes, pour éviter que l'une et l'autre ne soient systématiquement confrontées, j'ai mis en place des temps d'intégration différents pour qu'elles puissent exister l'une sans l'autre et je persiste à les faire travailler ensemble sur des temps courts.
Je pense être bien conscient que ce qui se joue ici est à mettre en lien avec les situations familiales, que ces filles rejouent plus ou moins consciemment les scènes de conflit vécues au domicile, d'autres conflits plus internes..., bien conscient également du fait que beaucoup d'éléments m'échappent et que mon attitude, ce que je renvoie de cette situation est très important, pourtant je m'épuise et le groupe s'épuise, nous sommes comme pris dans la transe de la répétition de ces scènes de conflit.
Avez-vous un avis, des pistes, une expérience similaire qui seraient susceptible de m'aider ?
Vive l'analyse des pratiques, caramba !
Je me permets de soumettre à votre analyse la situation suivante :
J'enseigne en CLIS depuis 7 ans (capsais D), dans une petite ZEP d'une petite ville de province. Il y a cette année 12 élèves dans ma classe, entre 9 et 13 ans, 8 garçons et 4 filles. Le niveau global se situe sur le cycle 2. C'est un groupe calme en comparaison avec ce que je peux lire ici ou là sur ce forum, sans doute un recrutement encore dans l'esprit "perf" de naguère. Les élèves travaillent quand ils sont disponibles, font des progrès, sont parfois difficiles et demandent de l'énergie... Rien que de très ordinaire, si j'ose. J'attache une importance énorme dans ma pratique au respect de la parole et j'essaie autant que je peux de faire avancer le groupe dans la pensée réflexive. Nous pratiquons un quoi de neuf quotidien qui sert de base aux activités de la matinée, un conseil, et un atelier philo avec la rééducatrice (pendant qu'elle existe encore)...
Voici le problème :
Depuis l'année dernière, deux de mes élèves, filles, du même âge, arrivées en même temps dans la classe, non lectrices, sont dans une relation fusionnelle qui se joue sur un mode conflictuel très sévère.
Miroir : elle ne peuvent se passer l'une de l'autre mais ne se supportent pas, l'une "A" (gros suivi hdj+sessad, famille thérap) passe à l'acte souvent et de manière parfois très violente, l'autre "O" (demande sessad en cours) agit de manière insidieuse pour déclencher les crises de "A" avec, il faut le dire, un certain succès. Les autres élèves filles se "liguent" à l'une ou l'autre en fonction de l'actualité, ce qui ne fait qu'envenimer les situations. “O” semble se complaire dans la position de victime de “A”. “A” se dit en permanence la cible des provocations de “O”. Elle vivent toutes les deux dans des configurations familiales compliquées, avec des recompositions et de sérieux conflits entre parents biologiques et beaux parents. Elles manipulent toutes les deux les adultes de l'école à leur manière propre, ce qui ne fait qu'enkyster les soucis. Ce matin, la belle mère de “O” a menacé “A” de représailles si elle continuait à martyriser “O”. “A”, effondrée, jure qu'elle n'a rien fait et demande refuge dans la classe pour ne pas “péter les plombs”, chaque déplacement du groupe est problématique (aucun problème en classe, mais le conseil est également un espace propice à la manipulation inconsciente du groupe de l'une au détriment de l'autre). J'en passe... Je pense que vous voyez le tableau et que cette situation fait écho à beaucoup d'autres pour vous.
Que faire ? Que fais-je ? J'essaie de tenir le cadre dans la plus grande neutralité mais je constate que je me sens parfois obligé de protéger “O” de “A” et inversement, cela va de soi. Je me sens objet de manipulation, inconsciente, certes, mais objet impuissant, ce que je n'opposerais pas pour autant à “non tout-puissant”. J'essaie de concilier dans la classe les travaux de groupes, individuels et en grands groupes, pour éviter que l'une et l'autre ne soient systématiquement confrontées, j'ai mis en place des temps d'intégration différents pour qu'elles puissent exister l'une sans l'autre et je persiste à les faire travailler ensemble sur des temps courts.
Je pense être bien conscient que ce qui se joue ici est à mettre en lien avec les situations familiales, que ces filles rejouent plus ou moins consciemment les scènes de conflit vécues au domicile, d'autres conflits plus internes..., bien conscient également du fait que beaucoup d'éléments m'échappent et que mon attitude, ce que je renvoie de cette situation est très important, pourtant je m'épuise et le groupe s'épuise, nous sommes comme pris dans la transe de la répétition de ces scènes de conflit.
Avez-vous un avis, des pistes, une expérience similaire qui seraient susceptible de m'aider ?
Vive l'analyse des pratiques, caramba !