Questions sur les effets des médicaments

Avec des enfants présentant des troubles graves de la personnalité.
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akila m
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Questions sur les effets des médicaments

Message par akila m »

Je suis inquiète (peut-être à tort) quand je vois le nombre d'élèves sous traitement (antipsychotiques, anti hyperactivité...) et les essais, mélanges qui s'effectuent sur eux. On ne peut que me répondre que je ne suis pas médecin et que ces derniers savent ce qu'ils font. Je le souhaite et j'aimerais avoir l'avis de médecins ou de personnes ayant étudiées le problème sur les effets sur le psychisme de tous ces médicaments à la mode. En vérité, je ne vois pas leur raison d'être ; étant toutes la journée avec des enfants dits malades mentaux depuis trois années, je constate les évolutions inattendues d'enfants qui n'ont jamais pris de médicaments ; est-ce le soin et l'accueil qu'on leur a donné ?
Je suis aussi très inquiète de la dérive : les parents deviennent demandeurs et les psychiatres suivent leur demande : ils sauraient presque mieux le médicament qui convient à leur enfant ; certains enseignants refusent des enfants dans leur classe s'ils n'ont pas l'assurance d'un traitement.
A-t-on déjà abordé le problème du moment de l'arrêt du traitement ? ces enfants vont-ils vivre ensuite avec ces traitements à vie ? Pour moi, c'est une grande violence qui leur est faite ; les parents qui s'opposent à toute médication deviennent des bourreaux qui refusent de soigner et d'empêcher leur enfant de souffrir. J'ai vu des traitements mis en place sans l'accord de la famille qui accroissaient la souffrance mentale. Généralement, les parents qui ont été traités en psychiatrie refusent les traitements pour leur enfant : peut-être suffit-il de connaître leurs effets sur soi pour les refuser ? Les psychiatres les ont-ils testé sur eux ? je vois aussi des effets indésirables qui rajoutent des difficultés supplémentaires aux enfants et pas des moindres : avoir toujours faim et ne pas comprendre pourquoi ; grossir et être la risée des autres. Être obligé de prendre des coupe-faim à 9 ans : l'enfant finit par se sentir responsable de cette nouvelle pulsion face à tous ces adultes qui cherchent à le limiter pour son bien.

Donc ma question, les effets des médicaments psychiatriques sur la vie subjective qui les connait ? Je me suis d'ailleurs aussi questionné sur la facilité avec laquelle une personne en deuil peut obtenir des anti-dépresseurs pour reprendre plus vite son travail ; la tristesse est même interdite.
mescudie
Pascal Ourghanlian
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Re: Questions sur les effets des médicaments

Message par Pascal Ourghanlian »

Bonsoir Michèle,
Coup de blues de vacances qui s'achèvent ou qui commencent ? :wink:

Comme vous le savez, ces questions me préoccupent aussi.
Elles vous viennent de ce que vous observez à l'HJ ; elles envahissent les centaines de réunion d'équipe que j'anime chaque année...
Elles profitent, je crois, d'un triple mouvement : la médicalisation croissante de notre société (en lien avec l'espoir (la croyance) de parvenir à lever toutes les énigmes biologiques), le recours inflationniste aux experts (auxquels on délègue le devoir de réflexion qui incombe à chacun, alors qu'on ne devrait solliciter d'eux que des savoirs - l'argument d'autorité de vos médecins...), le souci d'une normalisation apparente (qui s'apparente à une moralisation rampante).

J'ai déjà écrit que l'on pouvait comprendre ces parents excédés qui, du fait du "comportement" de leur gamin, se voient refuser toute vie sociale, tout apéritif chez les amis, toute sortie en ville - et retrouvent un peu de tout ça grâce à la normalisation permise par tel ou tel comprimé qui nivelle le dit "comportement" pour le rendre socialement acceptable/gérable. Et que, peut-être, en retour, il y avait aussi un gain pour le gamin.

Comprendre n'étant pas approuver, j'ai dit aussi ce que je pensais de ces médecins qui répondent à cette demande sans autre forme d'accompagnement. Bernard Golse et Pierre Delion, l'un à Necker, l'autre à Lille, ne sont pas farouchement opposés à un traitement médicamenteux SOUS LA CONDITION EXPRESSE que des mots soient mis dessus, et un accompagnement parallèle proposé à l'enfant (psychomoteur, psychothérapeutique, etc.) pour que la parole, seule garante du sujet (qu'il nomme ou qu'il soit nommé), prenne, peu à peu, le relais de la pharmacopée.

Seulement voilà : le temps du symptôme, lorsque les médicaments le masquent, redevient le temps social. Et on peut alors faire "comme si" tout était redevenu "normal". En ignorant superbement que le temps latent du "malaise" court en profondeur, jusqu'à, y compris, dissocier pour longtemps l'être apparent et l'être "réel" - que seule une relation à l'autre permet de limiter.

Vous savez aussi que la "guerre" fait rage, entre tenants d'une approche exclusivement chimique et ceux qui préconisent une approche psychodynamique. Cette guerre n'est pas nouvelle, elle s'exacerbe en ces temps difficiles économiquement où les laboratoires pharmaceutiques sont les vrais maîtres de la planète (désormais devant les lobbies pétroliers, à "égalité" avec les lobbies militaires).
Comme vous le soulignez, la réponse n'est sans doute pas dans un refus total et systématique du médicamenteux - mais dans sa mise en place précautionneuse et la réflexion, menée dès le début de sa mise en oeuvre, sur le "comment anticiper d'en sortir"...
Cordialement,
Pascal Ourghanlian
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