Ateliers philo

Avec des enfants présentant des troubles graves de la personnalité.
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akila m
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Ateliers philo

Message par akila m »

J'ai essayé de rechercher des infos sur ce sujet dans le forum mais je n'ai pas retrouvé.

Quelle forme donner à ces ateliers en hôpital de jour et pourquoi les faire ? En tout cas je le souhaite fortement.

Mes élèves ados ont remarqué que je ne mettais pas de barrage lorsqu'ils tentaient de dériver vers des sujets qui semblent les questionner et qui finalement me préoccupent à moi aussi. C'est à mes risques et périls car ils réagissent souvent après-coup par des comportements qui pourraient effrayer. Des questions finissent par être plus claires
dans des groupes de trois, quatre jeunes. La semaine dernière, l'un d'eux a abordé le problème du sens du mot psychiatrique ; est-ce que cela veut vraiment dire fou ? un autre le problème de la vie sans les parents ? un autre celui du sens que cela peut avoir pour des adultes de travailler dans un hôpital psychiatrique ; que se passe -t-il dans la vie pour qu'on grandisse tout en sentant qu'on est un bébé ? je leur répondais beaucoup en essayant de trouver en même temps qu'eux et ils semblaient très intéressés.
La semaine suivante, accueillant une stagiaire et l'infirmière dans la classe, ils se sont montrés élèves s'adonnant sans râler à des exercices de grammaire et de combinatoire ; une fois ces personnes parties, l'un d'eux a dit comme en clin d'œil : "maintenant on arrête de travailler" ; le spectacle était fini. Ils se sont levés en disant "puisqu'on est des fous,
faisons les fous" ; c'était bien eux mais avec leurs symptômes décuplés. La fatigue du vendredi aidant et me connaissant, j'ai vite senti que je n'aurais pas la force de les arrêter par la menace d'une exclusion ou en m'imposant en rappelant qu'on était en classe. Je me suis rendue compte qu'ils cherchaient à réfléchir en même temps et qu'ils attendaient que je les aide. j'ai essayé en disant ce qui me venait par la tête à ce sujet "la folie" ; même, s'ils ont gardé leurs bruits, des idées sont venues :"il y des fous à l'extérieur, dangereux comme les fous du volants" l'un d'eux a hurlé qu'il ne supportait plus qu'on le traite de fou dehors. Ils se sont arrêtés lorsque l'un a dit que ça y est il avait compris, il savait ce qu'il dirait si on le traitait de fou : "que ça peut arriver arriver à tout le monde dans la vie "
Nous avons terminé par un jeu de société et plus personne ne semblait fou.

Peut-on partir sur ce que l'on appelle des ateliers philos à partir de ce genre de questions ? En tout cas il est hors de question que je continue à pratiquer ce genre de chose hors cadre et seule .Même si cela n'empêche pas les temps qui ressemblent à ce qui ce passe dans une classe ordinaire.
Je voudrais présenter un projet à l'institution en espérant qu'une personne souhaite y adhérer aussi. Je ne connais pas d'albums simples permettant d'aborder toutes les questions dont ils souhaitent débattre. En fait leurs questions sont tellement compliquées que je doute que des auteurs pour enfants y ait pensé.

J'aimerais bien avoir des réponses et des pistes pour rédiger ce projet rapidement.

mescudie
clairea
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Re: ateliers philo

Message par clairea »

Il faut que je réfléchisse pour vous répondre, vos questions sont si denses que je vais me laisser un peu de temps.

Une chose cependant est certaine, votre questionnement et éventuel projet me séduit. Peut être parce que vos hésitations et votre façon d'appréhender votre relation à ces élèves marquent toute la finesse d'une attitude réflexive, réfléchie, loin de toute maîtrise idéalisée et que ce seul point m'invite à vous faire confiance.

Votre projet est difficile mais il semble devenir une évidence construite dans la médiation inter-subjective avec ce groupe.. alors qui mieux que vous et eux pour définir les possibles dans cet espace...

En revanche, ce projet mériterait un partenariat étroit, une co-intervention avec une autre personne référente, psychologue ou autre, pour que vous ne soyez jamais seule avec les inévitables incertitudes et angoisses que vont vous renvoyer ces jeunes. Vous allez alors devoir tenir et poser un cadre strict pour ne pas tomber dans le groupe thérapeutique mais si ces paroles émergent dans votre espace,il faut leur donner sans doute une place et questionner comme vous le faites, les conditions de leur émergence...
Avant de lancer quoi que ce soit, il faudra comprendre en quoi votre cadre permet il l'émergence de ce discours et de ces questionnements, c'est important pour que leur plainte et leur question ne vous emportent pas au-delà de ce que vous pourrez tolérer. Il ne s'agit pas d'ouvrir des brèches inutiles. La psychose a un versant délirant que vous ne devez pas alimenter malgré vous, mais un sujet psychotique est tout aussi touché par la philosophie qu'un autre sujet.

L'hôpital de jour devrait vous permettre de penser ce type de projet et de le soumettre à l'équipe soignante.

Je suis, dans tous les cas, curieuse de l'évolution de cette idée. Tenez moi au courant svp :)
akila m
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Re: Ateliers philo

Message par akila m »

D'accord.... bien sûr. Je suis consciente que ce travail en hôpital de jour demande une grande confiance entre les deux adultes qui vont le créer, et une délicatesse, et réflexion sur le cadre hors du commun. C'est vrai que j'ai un peu peur.
Je prends mon temps pour en parler à l'équipe et pour trouver cette personne.

En cette fin d'année où les enfants lâchent le scolaire, les thèmes foisonnent et nous ne serons pas à court pour commencer l'année prochaine : qu'est-ce que le mal ? existait-on avant de naître ? Qu'est-ce que les autres pourraient dire sur nous si on était mort ? Ce sont des questions très intimes qui vont devenir générales et ouvertes à tous sans que l'on ne sache plus de qui elles viennent personnellement.
Faudra-t-il choisir des thèmes plus vastes ? ou rester sur les questions précises qui émergent ?
Si ces paroles accentuent des angoisses, à quel moment arrêter ? Parfois les crises spectaculaires font naître de nouvelles pensées.
Devra-t-on imposer une place précise dans l'espace à chacun ? ou accepter que les jeunes puissent évoluer dans la pièce ?
le bâton de parole n'est-il pas plutôt inhibiteur et ralentisseur des pensées qui viennent ?

C'est la constitution du cadre qui m'inquiète ; atelier ouvert ou fermé ? (avec le même groupe) Quels rôles différents entre les adultes ; celui qui gère la parole et celui qui réfléchit tout haut ?

Voilà beaucoup de questions mais peut-être faut-il se lancer d'abord avant de savoir ?

En tout cas merci. je vous en reparlerez plus tard.
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