Handicap ?

Questions concernant la politique générale et l'organisation générale des enseignements spécialisés.
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Boogie
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Handicap ?

Message par Boogie »

Bonjour

J'aimerais ici ouvrir une discussion sur le sujet suivant : la scolarisation individuelle des enfants handicapés en classe dite ordinaire.

Je m'explique. J'ai réalisé, dans le cadre de la continuation de mon travail de l'an passé (viewtopic.php?f=35&t=2305), des entretiens avec des AVS-i. Parmi eux, trois sont dans leur seconde année, et trois sont dans leur cinquième ou sixième année. Un de mes premiers objectifs est de dresser ce que j'appelle leur "parcours d'accompagnement", c'est-à-dire un tableau qui récapitule par année scolaire les enfants avec lesquels ils ont travaillé, le niveau, l'âge par rapport au "cursus-type" comme dit Daniel, l'orientation, le nombre d'heures notifiées, la continuité ou non de l'accompagnement, et, bien sûr, le type de "handicap".

Il faut savoir, avant que je poursuive, qu'interroger ces six AVS et s'engager à dresser leur parcours d'accompagnement fait que je me retrouve avec un nombre très important d'enfants accompagnés : plus d'une cinquantaine. Pour le premier groupe des un an d'expérience, ça va de 3 à 5 enfants, et pour le second groupe, avec au moins cinq années de pratique, ça va de 6 (un parcours exceptionnel de continuité) à 15.

Ce que je constate dans ce que les AVS-i mentionnent du handicap des enfants accompagnés, c'est une nette prévalence du grand sac des troubles de l'apprentissage : les dys- sont sur-représentés, en particulier ces trois dernières années, mais il y a aussi des enfants pour lesquels il n'y a rien de précis (en tout cas rien qui n'a été divulgué aux AVS-i), rien d'autres que des problèmes de comportements et/ou d'apprentissage

Ma question est simple : les enfants concernés par l'ensemble des troubles "dys-" sont-ils handicapés ? Alors je sais bien qu'il y a depuis le 11 février 2005 une définition du handicap, qu'il faut en tenir compte, mais pensez-vous vraiment que les dys- entrent dans cette définition ?

Derrière tout ça, il y a une question que je me pose : n'assiste-t-on pas à un glissement de la grande difficulté scolaire vers le handicap ? Et à un remplacement subreptice des enseignants spécialisés par les AVS ? A un élargissement des frontières du handicap vers les terres de la difficulté scolaire ?

Qu'en pensez-vous ? Et qu'en pensent les enseignants référents, eux qui ont une vision d'ensemble ?
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AVD
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Re: handicap ?

Message par AVD »

Dans notre académie, les RASED devront, à partir de l'année prochaine, s'occuper prioritairement des dossiers MDPH.
Ça répond à votre question?
Boogie
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Re: handicap ?

Message par Boogie »

euh... non.

enfin... si : ça veut dire que oui, on amalgame handicap et difficulté scolaire ?

enfin, votre réponse est aussi laconique que je suis expansif, ce qui fait que je reste sur ma faim.
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Pascal Ourghanlian
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Re: handicap ?

Message par Pascal Ourghanlian »

Bonjour Guillaume,

Du bord de l'Océan, donc peu explicite :wink:

Ce que vous décrivez est la réalité : glissement, dû à une forte pression de l'Éducation nationale, de la difficulté ordinaire d'apprendre vers la prise en charge, donc vers le handicap. Car le handicap est bien "second" (et en ce sens totalement en contradiction avec l'esprit et la lettre de 2005) : un gamin est en difficulté, éventuellement grave, il n'y a plus de moyens pour aider l'instit' à l'aider (le soutien au soutien comme disait Lévine), on externalise la difficulté vers des prises en charge qui ne sont pas remboursées (sauf l'orthophonie, allez savoir pourquoi), conduisant les familles à se rapprocher de la MDPH pour bénéficier d'un statut (celui de handicapé) qui va permettre de financer ces prises en charge...

On revient là à l'incapacité des instit' dans leur classe à prendre en charge une différenciation des parcours en réponse à des besoins repérés. J'y vois une conséquence pas assez soulignée de l'évaluationnite qui nous accable : à force d'imposer des évaluations à quasiment tous les niveaux de la scolarité, les instit' bachotent, oubliant projets et individus. Ce qu'une réelle formation initiale aurait permis d'éviter, leur fournissant des armes pour contrer ces impositions d'en-haut.
La présence dans une classe d'un gamin handicapé exacerbe ce sentiment d'incompétence : je ne sais pas faire, je ne suis pas formé, d'autres, ailleurs, savent faire, je leur passe le bébé.

Concernant le fourre-tout des dys-, combien de handicaps structurels pour combien de handicaps situationnels ? 1 pour 1.000 sans doute. Mais comme la définition du handicap est désormais situationnelle, ... Ce qui est une bonne chose dans l'absolu du handicap. Mais une conn... monumentale dan le cadre d'une Éducation nationale qui n'a pas mis les moyens (et ne les mettra pas) pour aider les enseignants à comprendre de quoi il retourne. Pour le dire vite : ne pas faire classe le dos au tableau, mais mettre en place des dispositifs d'accompagnement de l'apprentissage qui prennent l'élève là où il est (n) et le fasse avancer à n+1. Ce qui remet en cause : cursus, programme, passage de classe d'année en année, etc.

Le handicap fait exploser l'École, et peut-être est-ce une bonne chose :roll:
Cordialement,
Pascal Ourghanlian
Boogie
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Re: handicap ?

Message par Boogie »

Merci de cette réponse, Pascal - plutôt explicite malgré l'océan :wink: .

A propos de cette "évaluationnite" que vous mentionnez, je me permets de rebondir en donnant l'information suivante - qui comporte un mot que je ne connaissais pas, et qui résume bien l'époque : la quantophrénie (http://classiques.uqac.ca/classiques/so ... e_tdm.html)

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La Nouvelle Revue de Psychosociologie, le Cirfip, l' ESCP Europe, le CERS, HEC Paris
et les éditions érès vous invitent à participer

au Colloque La passion évaluative
le samedi 13 mars 2010
ESCP Europe*
79 avenue de la République

75011 Paris

* Métro Saint-Maur

Participation : 5 euros/Inscription sur place

Contact : Pauline PEREZ perezp@hec.fr

Les éditions érès ont publié le n° 8 de la Nouvelle Revue de Psychosociologie

sous la direction de Gilles Amado et Eugène Enriquez La passion évaluative

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Il est de notoriété publique aujourd'hui que des pratiques d'évaluations multiples et variées tendent à envahir tous les niveaux de la société française, évaluations dans l'ensemble plus sommatives que formatives, parfois dans une sorte de délire quantophrénique et insidieusement normalisateur. Bien entendu, un refus absolu de l'évaluation serait à la fois suspect et naïf, car aucun groupement ne peut s'instituer et durer s'il oublie de mettre au point certains indicateurs témoignant de ses choix. L'évaluation ne peut donc être totalement dissociée d'un jugement, lequel renvoi de près ou de loin à des règles, des valeurs ou des croyances plus ou moins claires. C'est pourquoi, en cette période d'activisme évaluatif, il nous paraît important de faire le point non seulement sur les sources des dérives, impasses et perversions actuelles de certaines pratiques et procédures, mais aussi d'explorer les conditions permettant de faire de l'évaluation un processus à la fois dynamique et créateur.

Avec la participation de : Michel Chauvière, Roland Gori, André Levy, Marie-Anne Dujarier, Frédéric Blondel, Sabine Delzescaux, Xavier Brifault.
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Céline71
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Re: handicap ?

Message par Céline71 »

"Derrière tout ça, il y a une question que je me pose : n'assiste-t-on pas à un glissement de la grande difficulté scolaire vers le handicap ? Et à un remplacement subreptice des enseignants spécialisés par les AVS ? A un élargissement des frontières du handicap vers les terres de la difficulté scolaire ?"
Oui je le crois, la difficulté scolaire est de plus en tirée dans le champ du handicap. J'ai d'ailleurs trouvé que la nouvelle circulaire RASED allait en ce sens, en comparant point à point les circulaires de 2002 et celles de 2009. Si ça vous intéresse, relisez les 2 et dites moi ce que vous en pensez...
Ceci dans le contexte d'une société qui médicalise de plus en plus la difficulté...

"Dans notre académie, les RASED devront, à partir de l'année prochaine, s'occuper prioritairement des dossiers MDPH"
Cela me semble un abus de pouvoir, auquel il faut résister car un abus est hors-cadre. En tout cas même si la dernière circulaire tend à tirer les enseignants spé E et G dans le champ du handicap, il n'est écrit nulle part que les RASED doivent s'occuper prioritairement des dossiers MDPH.
Or ce sont les circulaires qui définissent les missions et pas telle ou telle lubie des IA ou des IEN. Nul n'est tout-puissant même si ces initiatives semblent dans l'air du temps...

Concernant les enfants dits "dys-quelque chose", ils ont souvent sur mon secteur un dossier MDPH et une reconnaissance de handicap... Tout cela souvent pour pouvoir bénéficier d'une AVS ou de prises en charge extérieures "remboursées" (par exemple ergothérapie, très en vogue en ce moment dans le coin où je travaille).
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